W. von Wartburg a écrit quelque part que " le français était du latin prolongé à l'état vivant ", sans méconnaître, naturellement, toutes les évolutions et les accidents qui se sont produits au cours de vingt siècles d'emploi quotidien de la langue. Et il s'en est produit ! Que l'on essaie d'imaginer cette longue vie d'une langue colonisatrice, apprise d'abord lentement, difficilement, dans les contacts sociaux par des millions d'individus dispersés sur le territoire de la vaste Gaule, mais apprise tout de même au bout de quatre ou cinq siècles, puis utilisée ensuite tous les jours en dépit de tout, des invasions, des divisions territoriales, des guerres féodales, puis enfin dans un état unifié qui a imposé le dialecte de ses rois et de la République comme langue nationale… Les verbes latins qui venaient de très loin, dans l'espace et le temps, étaient parfois très compliqués, avec leurs " temps primitifs " divers. On ne s'étonne pas si l'on trouve, vingt siècles après - et notamment après ceux que l'on a évoqués -, tant de " verbes irréguliers " en français. Les expliquer un par un, en donnant, avec leurs origines, les jalons de leur longue et multiple existence, donner aussi naturellement les formes successives des conjugaisons régulières, tel est l'objet du présent livre ; car tous ces verbes viennent du latin, ou du moins ont été latinisés s'ils étaient d'origine grecque, germanique… ou même celtique (changer, par exemple). Contre cette évidence personne ne peut rien.