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LA VERTU DES PASSIONS
l'esthétique et la morale au miroir de la tragédie lyrique (1673-1733)
GUYON-LECOQ CAMILLE
Peut-on se passer de réintégrer la tragédie lyrique dans le cours de l'histoire de la culture pour étudier l'apparition d'une morale "moderne"? C'est bien sur la scène de l'Académie Royale de Musique que naît, au tournant des Lumières, un genre qui conteste le primat de l'héroïsme et des valeurs sociales mondaines, et fonde sur la sensibilité naturelle l'idée d'une vertu privée, assurant la promotion des valeurs féminines quand la société appelle les femmes à des valeurs universalistes. S'appuyant sur les débats d'idées de la Querelle des Anciens et des Modernes, s'attachant à lire dans le détail les condamnations aussi bien que les défenses du genre sous le rapport de la morale et de l'esthétique, cet ouvrage fait l'hypothèse que, prenant la scène lyrique pour laboratoire, les Modernes étendirent aux lois qui régissent le Beau leurs réflexions sur la stabilité ou l'instabilité des lois de la Nature et tâchèrent de penser la solidarité des arts sur le modèle de la solidarité des sciences. La tragédie lyrique, qui naturalise le surnaturel et représente le malheur d'individus moyens, favorise une esthétique du touchant mise au service d'une morale tendre que caractérise la sentimentalisation des valeurs. Il fallait interroger aussi bien les livrets que la musique et les divers éléments qui composent le spectacle pour préciser les modalités selon lesquelles cet art d'exécution, qui conduit à adopter un nouveau point de vue sur les œuvres de l'art, représente une vertu modérée mêlée de passions douces.